Si les traumatismes (ou psychotraumatismes) peuvent impacter fortement la vie d’une personne, l’hypnose se présente comme une discipline efficace pour en favoriser l’accompagnement. À travers un renforcement de la sécurité intérieure et par la permission d’un changement de perspective, l’hypnothérapie créé les conditions nécessaires au soulagement des effets d’un traumatisme psychique.
Sommaire
Freud : le double refus du traumatisme et de l’hypnose
1890. Deux figures de la psychologie, Pierre Janet et Sigmund Freud, s’intéressent aux origines de l’hystérie. Janet, pionnier dans l’étude des traumatismes, utilise l’hypnose pour aider ses patientes à se confronter aux souvenirs enfouis de leurs expériences traumatiques qu’il considère comme la source des symptômes hystériques, ouvrant ainsi une voie de guérison.
Freud, influencé par Janet, expérimente aussi l’hypnose pour faire émerger des souvenirs traumatiques chez ses patientes. Mais au fil de ses séances, les récits qui émergent évoquent des traumatismes sexuels si récurrents que Freud en vient à douter qu’ils soient tous réels. Face au tabou social que représentent les violences sexuelles faites aux femmes (notamment dans le cadre familial), il prend une autre direction et en vient à une nouvelle hypothèse : et si ces souvenirs n’étaient pas des événements réels mais des fantasmes inconscients ?
Ce tournant marque l’éloignement de Freud par rapport à Janet et ouvre la voie à la psychanalyse, centrée non plus sur l’hypnose et le traumatisme, mais sur l’exploration des désirs et des conflits inconscients. Il faudra attendre près d’un siècle pour que l’hypnose retrouve un intérêt thérapeutique et pour que les psychotraumatismes reçoivent une reconnaissance médicale en 1980 avec l’entrée au DSM-III du trouble de stress post-traumatique (TSPT).
Les mécanismes du traumatisme et du trouble de stress post-traumatique
Le traumatisme (appelé aussi traumatisme psychique ou psychotraumatisme) est une blessure invisible mais profondément marquante, souvent déclenchée par un ou des événements violents. Il se manifeste par des symptômes émotionnels, physiques et cognitifs particulier.
Deux différents types de traumatismes psychiques sont aujourd’hui distingués par le travail de Judith Herman :
– les traumas simples : traumatismes liés à un événement unique comme un accident ou une agression.
– les traumas complexes : traumatismes qui résultent d’événements répétitifs ou prolongés, tels que les violences physiques ou émotionnelles chroniques.
Pionnier dans le domaine du traumatisme, Pierre Janet a observé que les individus traumatisés, que ce soit à la suite d’un traumatisme simple ou un traumatisme complexe, développent une forme de « blocage psychique » qui ne permet pas le traitement efficace du souvenir douloureux.
Ce blocage entraine alors un déséquilibre entre une manière de se penser, une perception du monde environnant et des émotions qui surgissent. Ce déséquilibre, qu’il est possible d’accompagner avec l’hypnose, est reconnu officiellement comme pathologie à la fin du XXe siècle et prend le nom de trouble de stress post-traumatique.
Le trouble de stress post-traumatique entraine plusieurs types d’altérations :
– reviviscence répétitive des évènements (flashbacks)
– évitements (personnes, endroits, sujets de discussion)
– activités neurovégétatives (hypervigilance, irritabilité, difficultés de concentration)
– dissociations (dissociation émotionnelle, amnésie dissociative)
Comment l’hypnose accompagne les psychotraumatismes ?
Un psychotraumatisme se traduit donc en général par une série de réactions involontaires qui surviennent de manière persistante et incontrôlable :
– des réactions qui constituent ce que l’on appelle le trouble de stress post-traumatique (TSPS) : flashbacks, évitements et activité neurovégétative accrue.
– un ensemble plus vaste de symptômes : troubles de l’humeur, troubles alimentaires, troubles anxieux généralisés, troubles du sommeil, insécurité, stress, angoisses et anxiété…
Sur plusieurs points l’hypnothérapie s’affirme comme un accompagnement efficace concernant le traitement des traumatismes :
1) l’hypnose permet de rétablir un sentiment de sécurité intérieure : sous hypnose, la personne peut se confronter à ses souvenirs traumatiques et les observer sans les revivre de manière brutale.
2) l’hypnose permet de redonner du sens aux événements traumatisants : en s’y confrontant et en pensant différemment ses souvenirs, il est possible de leur donner une place dans notre histoire de vie.
3) enfin l’hypnose amène la remise en mouvement que Janet considère comme essentielle afin de se libérer du blocage et de retrouver une capacité d’action.
Approches thérapeutiques contemporaines du traumatisme par l’hypnose
Si l’hypnose est de plus en plus utilisée pour traiter les psychotraumatismes c’est donc qu’elle offre les trois conditions nécessaires à leur prise en charge (apporter de la sécurité, établir du lien et créer du sens) et qu’elle permet une remise en mouvement de la psyché.
Cette approche, initiée au début du XXe siècle par Pierre Janet, est aujourd’hui reprise par de nombreux thérapeutes contemporains tels que David Spiegel ou Bessel van der Kolk qui l’ont intégrée dans les thérapies des traumatismes en lien avec la pleine conscience et la neurobiologie.
Des études récentes menées par François Roustang (qui suggère que l’hypnose aide à recentrer l’attention sur le moment présent) ou Steven Jay Lynn (qui voit dans l’hypnose un moyen de restructurer la perception des souvenirs, rendant ainsi possible la réintégration émotionnelle) montrent comment l’hypnose permet d’atténuer les symptômes de stress post-traumatique et de réduire l’hypervigilance liée au traumatisme.
De ce dépassement naît alors une rééquilibration notre manière d’être-au-monde, une remise en mouvement et un retour à une vie agréable.
